Examen régional : Académie de Marrakech-Tansift-Haouz (session
: Juin 2010)
Tant que j’ai marché dans les galeries publiques du Palais
de Justice, je me suis senti presque libre et à l'aise; mais toute ma
résolution m'a abandonné quand on a ouvert devant moi des portes basses, des
escaliers secrets, des couloirs intérieurs, de longs corridors étouffés et
sourds, où il n'entre que ceux qui condamnent ou ceux qui sont condamnés.
L’huissier m'accompagnait toujours. Le prêtre m'avait quitté
pour revenir dans deux heures: il avait ses affaires.
On m'a conduit au cabinet du directeur entre les mains
duquel l'huissier m'a remis.
C'était un échange. Le directeur l'a prié d'attendre un
instant lui annonçant qu'il allait avoir du gibier à lui remettre, afin qu'il
le conduisît sur-le-champ à Bicêtre par le retour de la carriole. Sans doute le
condamné d'aujourd'hui, celui qui doit coucher ce soir sur la botte de paille
que je n'ai pas eu le temps d'user.
- « C'est bon, a dit l'huissier au directeur, je vais
attendre un moment; nous ferons les deux procès verbaux à la fois, cela s'arrange
bien».
En attendant, on m'a déposé dans un cabinet attenant à celui
du directeur. Là, on m'a laissé seul, bien verrouillé.
Je ne sais à quoi je pensais, ni depuis combien de temps j'étais
là, quand un brusque et violent éclat de rire à mon oreille m'a réveillé de ma
rêverie.
J'ai levé les yeux en tressaillant. Je n'étais plus seul
dans la cellule. Un homme s'y trouvait avec moi, un homme d'environ cinquante-cinq
ans, de moyenne taille; ridé, voûté, grisonnant; à membres trapus; avec un
regard louche dans des yeux gris, un rire amer sur le visage; sale, en
guenilles, demi-nu, repoussant à voir.
Il paraît que la porte s'était ouverte, l'avait vomi, puis s'était
refermée sans que je m'en fusse aperçu. Si la mort pouvait venir ainsi!
Nous nous sommes regardés quelques secondes fixement, l'homme
et moi; lui, prolongeant son rire qui ressemblait à un râle; moi, demi-étonné, demi-effrayé.
- « Qui êtes-vous? Lui ai-je dit enfin.
-Drôle de demande! a-t-il répondu. Un friauche.
- Un friauche ! Qu'est-ce que cela veut dire?
-Cela veut dire, s'est-il écrié au milieu d'un éclat de rire,
que la taule jouera au panier avec ma sorbonne dans six semaines, comme il va
faire avec ta tronche dans six heures ».
(1) Ma sorbonne : ma tête.
I. - Étude de texte (10 points)
1) En vous référant à votre lecture de l'œuvre,
a) copiez et complétez le tableau suivant:
Auteur
|
Œuvre
|
Genre
|
Date de parution
|
Vous rédigez un article d'une vingtaine de lignes, destiné
au journal de votre lycée, dans lequel vous essaierez de convaincre les jeunes
de votre âge de l'importance du rôle social de l'école.
b) situez le passage dans l’œuvre. (2 points)
2) Dans le premier paragraphe de ce passage, le narrateur
décrit des lieux. (1 point)
a) Quelle impression se dégage de cette description?
b) Relevez deux expressions justifiant cette impression.
3) «Je me suis senti presque libre et à l'aise».
a) Ce sentiment, a-t-il duré longtemps chez le narrateur?
b) Justifiez votre réponse par une phrase du texte. (1 point)
4) a) Pour quelle raison conduit-on le condamné au cabinet
du directeur ?
b) Comment sont considérés les prisonniers par le personnel
de la prison?
c) Quelle image l'auteur donne-t-il de ce personnel? (1,5
point)
5) Le narrateur n'était pas seul dans la pièce qu'il
occupait.
Pourquoi ne s'en est-il pas rendu compte? (1 point)
6) a) Quel sentiment le narrateur éprouve-t-il à l'égard de
son compagnon?
b) Relevez deux expressions qui justifient votre réponse. (1
point)
7) a) Dans quel niveau de langue s'exprime ce compagnon?
b) Relevez deux expressions qui justifient votre réponse. (1,5
point)
8) Précisez la figure de style employée dans chacun des
énoncés suivants
a) La porte l'avait vomi.
b) …..lui, prolongeant son rire qui ressemblait à un râle. (1
point)
II. - Production Écrite (10 points)
«Je n'ai jamais connu l'école ; l'ignorance m'a conduit en
prison », déclare un jeune prisonnier à un journaliste.
La situation douloureuse dans laquelle se trouve ce jeune ne
vous laisse certainement pas indifférent.
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